« Affirmation de l’identitaire-toumast n’Kel Tamacheqh : quelle représentativité politique au Mali ? », par AG AZMANE, en 2014.

Suite à la création à Bamako (Mali), le 13 Avril 2013, d’une Plateforme kel Tamacheqh, organisation de la société civile originale et loyaliste qui entend refonder les concepts d’appartenance et de la représentativité de la communauté kel Tamacheqh dans le concert de la Nation malienne globale, des réactions négatives sont entendues qui critiquent cet « accouchement » tardif d’une organisation de la société civile kel Tamacheqh qui a, cependant, trois fondements fondamentaux justes :

  1. la plateforme vise à réaffirmer l’attachement à la République du Mali (et à la laïcité républicaine)  de ses membres fondateurs, à savoir des notables, des leaders et des intellectuels issus de la communauté kel Tamacheqh;
  2. la plateforme exige la neutralisation de tous les groupes armés ; cela signifie que ce mouvement de la société civile malienne affirme, ici et maintenant,  sa démarcation nette et claire des indépendantistes du MNLA ;
  3. les initiateurs de la plateforme optent pour une clarification/affirmation de l’identitaire et du marqueur sociétal et communautaire « Toumast n’kel Tamacheqh », un paradigme ainsi officialisé qui entend se substituer au générique « touareg » qui n’est pas approprié par la communauté kel Tamacheqh.

Je prends le contrepied de ceux qui critiquent, moins la plateforme de par son projet, que par le doute émis par ses détracteurs sur la sincérité et la loyauté de certains des « géniteurs » de la plateforme, singulièrement l’Honorable Député Bajan AG HAMATOU, l’Amanokal de la célèbre confédération des Iwellemeden de l’Ezawagh-Ménaka qui est ainsi indexé.

De mon humble avis assumé, les détracteurs de la plateforme sont reconnus comme étant d’indécrottables affidés du Mouvement des Narcotrafiquants et Lâches Apatrides (MNLA) qui craignent, « chat échaudé craint l’eau froide », que la légitimité de leurs farfelues et rêveuses-cauchemardes revendications au nom de la Communauté kel Tamacheqh malienne ne s’exprime plus par d’anciens mercenaires de Kadhafi venant de la Libye, des SDF Sahariens pilleurs et vandales, mais par des représentants élus ou via des notables reconnus qui émanent de la société civile  kel Tamacheqh ; voici ce que j’en pense formulé dans une contribution datée de Septembre 2013 intitulée « La représentativité politique chez les touaregs nomades au Mali » par Mohamed AG HAMATY, ingénieur des Eaux et Forêts à la retraite à Bamako, Mali.

Concernant la clarification/affirmation de l’identitaire et du marqueur sociétal et communautaire « kel Tamacheqh » (« Tamouchagha », en Tamacheqh facile), qui sera officialisé en se substituant au générique « touareg » qui n’est pas approprié par la communauté kel Tamacheqh, je recopie aussi l’article de presse intitulé « Appelons-nous kel Tamasheq et non Tuareg, un article qui date de 2008 écrit par La Conférence Tamasheq pour l’Unité ».

INTRODUCTION

Tous Kel Tamacheqh se reconnaissent une histoire et des références communes (langage, mode de vie…) fondant un solide sentiment d’appartenance à une identité forte (Temoust, Tamouchagha) ; en effet, pour s’identifier, Kel Tamacheqh utilisent les termes : u’Tamacheqh (« celui qui parle le Tamacheqh »), « amajagh » ou « amachegh » (le brave), selon les régions.

La dénomination « Touareg », couramment utilisée par les arabes et par la suite les colons français pour désigner ce farouche peuple saharien, viendrait du nom d’une région nommée Targa, située au Fezzan, en Libye, région qui serait le bastion des Kel Tamacheqh du Mali et du Niger.

  1. Création d’une plateforme, un nouveau mouvement kel Tamacheqh original et loyaliste, qui entend se poser comme une alternative aux indépendantistes touaregs du MNLA, par RFI du 14 Avril 2013.


     Le Mali a vu la naissance d’un nouveau mouvement touareg qui entend se poser comme une alternative aux indépendantistes touaregs du MNLA. La Plateforme des cadres et des leaders kel-tamasheks, c’est-à-dire touareg, pour l’unité nationale du Mali, a été officiellement lancée samedi 13 avril 2013. Cette plateforme prétend représenter la majorité des Touaregs, tous ceux qui n’ont pas pris les armes et qui se sentent Maliens.


      Les principaux objectifs de cette nouvelle plateforme tamashek, c’est-à-dire touareg,  sont de réaffirmer l’attachement de la communauté kel Tamacheqh à la République du Mali et à la laïcité, et d’exiger la neutralisation de tous les groupes armés. Cela signifie que ce mouvement veut se démarquer des indépendantistes du MNLA.


     Son président, le député de Ménaka, Bajan Ag Hamatou, l’affirme lui-même : « Tous les touaregs sont loin d’être MNLA. Il se trouve que ces reblelles sont des hommes qui ne nous ont jamais représenté, qu’on n’a jamais mandaté et qui parlent en notre nom, ce n’est pas normal. Nous sommes là pour dire : voilà ce que c’est les touaregs du Mali. »


     Composée d’un ex-premier ministre (Ahmad Mohamed AG HAMANI, NDLR), de plusieurs anciens ministres et d’actuels députés, maires ou conseillers territoriaux et des intellectuels touaregs, la plateforme rassemble des élus issus des trois régions du Nord. Il faut tout de même noter l’absence des Ifoghas au sein du bureau de la plateforme, une tribu qui exerce traditionnellement le rôle de chef à Kidal ; fief du MNLA (ceci expliquant cela, NDLR).


     Près d’un an et demi après les premières attaques des indépendantistes, et alors que le dialogue national s’amorce, certains sont tentés de voir dans cette organisation la main des autorités maliennes. Bajan Ag Hamatou s’en défend : « Nous, on est instrumentalisé par personne. Si certains se plaisent à dire « oui, ce sont des représentants du gouvernement malien »; mais, eux ils représentent qui ? »


    La plateforme se dit prête à collaborer avec la Commission dialogue et réconciliation mise en place par les autorités maliennes.

  • « Appelons-nous kel Tamasheqh et non Touaregs », titre d’un commentaire d’un anonyme qui signe « La Conférence Tamasheqh pour l’Unité » dans un article de presse malienne qui date de 2008.


Chers frères et sœurs kelTamasheqh ;

 Notre communauté se trouve aujourd’hui au carrefour de sa destinée, de son futur. Ce futur, il peut être brillant et nous permettre de faire renaitre notre si belle et ancienne culture. Ce futur n il peut également être très sombre et mener à la disparition de notre culture.


Face à tous les dangers …


Chers frères et sœurs ;

Nous sommes tous conscients de certains dangers qui nous guettent. La survie de notre culture fut mise en cause le jour où la France à coloniser l’ensemble du pays Tamasheq. Elle fut également mise en cause le jour où il a été décidé que le pays Tamasheq sera partagé entre cinq états et que les Tamasheq seront minoritaires démographiquement, culturellement, politiquement, et économiquement. Elle est également mise en cause par l’exploitation des ressources naturelles dont regorgent notre sol comme l’or, le pétrole, et l’uranium, entre autres, mais aussi son emplacement géostratégique en tant que pont entre le Maghreb et l’Afrique Sub-saharienne. Aussi, est-elle mise en cause et continuera d’être mise en cause par la présence des anciens terroristes du GSPC (Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat) aujourd’hui appelé Al Qaeda au Maghreb Islamique et qui opère en partie sur nos terres.


… l’Unité véritable comme seul salut …


Chers frères et sœurs;

Nous sommes convaincus que le seul moyen de traverser, avec succès ce carrefour, sera au travers de l’unité de l’ensemble de la communauté. Rappelons-nous de ces mots sages de Kaoucen Ag Mohamed, grand résistant u’Tamasheq, contre la colonisation Française qui nous indiquait que « jamais un non u’Tamasheq ne nous aimera au point de nous créer un quelconque futur et que l’unité est notre seul salut ».

Chers frères et sœurs ;

C’est cette unité qui fera de nous un lion et non plus une souris.


Ne nous trompons pas, cette véritable unité ne naitra pas du jour au lendemain. Cette véritable unité sera difficile à atteindre tant la division est profonde au sein de notre société. Mais chers frères et sœurs, pour notre communauté, pour notre culture nous ne devons épargner aucune énergie.


Chers frères et sœurs ;

Ce travail, c’est l’ensemble des nobles œuvres qu’on entreprendra afin d’aboutir au trésor qu’est l’unité de la jeunesse kel Tamasheq. Creusons, fouillons, bêchons toutes ces chaudes dunes de sable de notre désert que nous ne vendrons pour rien au monde; ne laissons nulle place où la main ne passe et repasse. C’est seulement après cela que nous pourrons trouver ce trésor que les générations précédentes n’ont pu trouver.


Chers frères et sœurs ;

C’est cette unité et seulement cette unité qui nous permettra de prendre notre destin en main et d’éviter la disparition de la culture n’kel Tamasheq.


CTU-Tumast est convaincue que prendre notre destin en main veut dire écrire notre propre histoire. Prendre notre destin en main veut dire nous présenter au monde entier de la manière que nous jugeons la plus appropriée. Nous avons acquis la certitude selon laquelle la première étape de l’établissement cette identité propre consiste à ce qu’on soit identifié dans le monde entier sous le nom de kel Tamasheq et non de Tuareg.


… l’auto-identification comme pierre angulaire


Entre nous, nous ne nous appelons jamais Tuareg. Nous nous appelons toujours ‘Kal Tamasheq.’ Par conséquent, le nom Tuareg nous est étranger. Comment souhaitons-nous être identifié avec honneur lorsque nous laissons aux autres le soin de dire qui nous sommes ?

A travers nos recherches, il nous est apparu qu’une origine précise n’est pas attribuée au mot Tuareg. Certains disent qu’il vient de l’arabe ‘Tawariq’ qui signifierait ‘abandonnés de Dieu.’ Pour d’autres, le nom vient de la ville libyenne ‘Targa’ dans l’actuel Fezzan dont nous serions originaires. Enfin, pour certains chercheurs, ce nom nous vient d’un de nos ancêtres et brave guerrier.


Chers frères et sœurs ;

Nous remarquons que dans tous ces cas, ce nom de Tuareg ne nous appartient pas. Nous invitons donc l’ensemble de la jeunesse kel Tamasheq à joindre nos forces afin de demander au monde entier de se référer dorénavant à nous comme ‘kel Tamasheq’ et non comme ‘Tuareg,’ ‘Touareg’ ou ‘Tawariq.’ Nous nous sommes uniquement limités à kel Tamasheq parce que nous reconnaissons les difficultés que peuvent rencontrer les peuples du monde en nous appelant ‘u’Tamasheq’, ‘Kal Tamasheq’, ‘Walet Tamasheq’ ou encore ‘Chat Tamasheq’ selon les circonstances. Vu que le Chinois parle le Chinois, et l’Anglais parle l’Anglais, nous concevons que la langue Tamasheq puisse également être parlée par un u’Tamasheq. Notre appellation de kel Tamasheq ne changera pas en fonction du genre ou du nombre. Ceci voudra dire que le féminin, masculin, le singulier ou le pluriel de u’Tamasheq sera kel Tamasheq.


Rien n’est impossible


Chers frères et sœurs ;

Nous sommes conscients de la difficulté que sera l’utilisation de kel Tamasheq en lieu et place de Tuareg dans le monde entier. Cependant, nous avons aussi la haute conviction selon laquelle rien n’est impossible et que seul le ciel est la limite. Par conséquent, nous lançons un appel solennel à la jeunesse u’Tamasheq de nous rejoindre et de remplacer le mot Tuareg par le mot kel Tamasheq. Nous sommes convaincus qu’il n’est pas assez tard de faire un tel changement car il n’est jamais assez tard pour rétablir une vérité noble et historique.


Dès que la jeunesse aura adopté cette appellation, nous commencerons une campagne de communication traduite dans toutes les langues officielles du monde et qui sera dirigée vers tous les pays à l’attention des décideurs politiques, des médias, des instituts de recherches et de publications scientifiques, ainsi qu’aux autres supports publics.


Chers frères et sœurs ;

Encore, rien n’est impossible lorsque nous creusons, fouillons, bêchons toutes les chaudes dunes de sable de notre désert que nous ne vendrons pour rien au monde.


Créé le mardi 12 août 2008

Écrit par La Conférence Tamasheq pour l’Unité

PS. : Débaptiser le Touareg pour les kel Tamasheq n’est pas une idée exclusive de Bajan qui demande au Mali de rendre ça officiel, c’est tout. Ce n’est qu’une proposition.

  • La représentativité politique chez les touaregs nomades au Mali, par Mohamed AG HAMATY, ingénieur forestier à la retraite, spécialiste de l’aménagement du territoire/développement rural et de la gestion de l’environnement/biodiversité ; Bamako-Mali ; e-mail : medaghamati@gmail.com

Introduction.

Il s’agit d’envisager comment tenir compte de la pratique politique traditionnelle ancienne de la communauté touarègue nomade dans le dispositif politique national moderne actuel.

Le contexte historique, anthropologique et politique des Confédérations nomades touarègues d’avant le Mali.

Selon l’histoire du Sahara central et l’anthropologie des touaregs qui l’habitaient depuis le 10ième siècle, les Confédérations nomades touarèguesavaient une organisation territoriale et politique qui dura jusqu’au 16ième siècle, la TADEMAKATT, qui couvrait le territoire de la région actuelle de Kidal, sa capitale étant Es-Souk, ville historique florissante qui était une escale sur les routes trans sahariennes reliant Gao, Tombouctou, Araouane, Aoudaghost  et Chinguetti  au Maghreb et au Moyen Orient; « la route de la Mecque » (« tade n makatt », en Tamacheq) étant l’appellation de cette contrée de passage; la villed’Es-Souk serait détruite à la fin du 16ième siècle  par l’Empire Songhoï.

Les historiens mentionnent que la TADEMAKATT était gouvernée, successivement, par des rois berbères, arabo-berbères et touaregs qui faisaient régner l’ordre dans les Confédérations nomades touarègues tributaires dont la confédération des Iwellemeden.

La confédération des Iwellemeden qui s’émancipa la première des rois de la Tademakkat évolua en Tribu indépendante dont l’Amghar-Amanokal est Karidenna ; ce groupe touareg nomade guerrier, avant d’évoluer plus au Sud, dans le Tamesna, ensuite dans l’Ezawagh (Ménaka), à partir du 17ième siècle, faisait payer le tribut par les autres Confédérations nomades touarègues anciens tributaires du Tademakkat.

Les confédérations touarègues nomades dites « Tademakkat » ou « Iguelad » s’émancipèrent  des Iwellemeden et essaimèrent, vers le Sud-Ouest, du 18ième au 19ième siècle, dans la ceinture des puits du Haoussa et de l’Aklé-Azawad (ligne Bourem-Inokander- Araouane-Faguibine) et dans la Boucle du Niger (épicentre Tombouctou).

Seul le groupe Ifoghas ayant fui l’Ahaggar arriva tard dans la Tademakkat et se  libéra aussi vite de la tutelle des Iwellemeden. Les Ifoghas qui sont des « Ineslemen » (marabouts Chérifens) demeureront sur place dans la région qui s’appellera depuis lors Adagh n Foghas.

 Les guerriers Ifoghas qui mettront sous leur tutelle (tributaires) les groupes Imghad et Idnan de l’Adagh s’adonneront aux razzias et aux rançons des caravaniers des routes transsahariennes qui passent par leur territoire ; cependant, des bandes de razzias des Rguéibats du Rio de Oro et de la Saguiet el-Hamra (l’ancien Sahara Espagnol et actuel Sahara Occidental sous occupation marocaine) faisaient des incursions sporadiques dans l’Adagh jusqu’à l’arrivée des colons français.

Jusqu’à l’arrivée des colons français, les guerriersIwellemeden entretenaient la belligérance et razziaient les animaux des autres confédérations touarègues et arabes de la Boucle du Niger, territoire qui fut sous leur contrôle, de Ménaka à Tombouctou.

A l’arrivée des colonisateurs français et peu avant l’indépendance du Mali, les Confédérations nomades touarègues dites historiquement « Tademakkat » ou « Iguelad » se présentaient sous la forme de « conglomérats » de clans ethniques regroupés autour d’un « Tobol » (tambour de l’Amanokal) ou de la « la tente d’un Amghar », Chef de tribu.

            La pratique politique des Confédérations touarègues « primaires » est essentiellement basée sur le respect et l’application stricte des commandements – autocratie féodale? – de l’Amghar/Amanokal (Roi) de la tribu qui règle, avec l’appui d’un conseil de tribu composé d’hommes sages « triés sur le volet », tous les problèmes de la communauté sous sa suzeraineté.

Le droit de succession de l’Amanokal de la Tribu était dévolu à un neveu du chef (l’un des fils de ses sœurs) chez les Tribus guerrière des Imouchagh (cas des Iwellemeden) ou à l’un des fils du chef chez les Tribus maraboutiques (cas des kel-Antesser).

            Un seul cas de démocratie « consensiotale » (basée sur le consensus) est cité dans les chroniques historiennes orales de la Confédération touarègue nomade dite « kel Antessar-Chérifens » aux 18-19ième siècles ; Tribu issue de la Tademakkat historique évoluant à l’époque dans la ceinture des puits pastoraux du Nord-Est de Tombouctou (ligne Boujbéha-Inokander-Araouane) ; toponymie des puits pastoraux dont sont issus les noms patronymiques de toutes les fractions kel Antessar-Chérifens actuels de la Boucle du Niger, tels kel In-Abalahen, kel-Inokander, kel In-Agozmi, kel Aghezaf, kel Tintébéremt, kel In-Diaren, etc.    La Tribu kel Antessar-Chérifens de l’époque faisait désigner son Amanokal par consens et à tours de rôle ; une assemblée des délégués ou chefs des fractions se tenait chaque deux ans pour « voter » celui auquel on remettra le Tobol et qui sera l’Amanokal de la Tribu pendant seulement deux ans, période à l’issue de laquelle, le chef remet sa « démission » et l’on passe le pouvoir à un autre désigné dans une autre fraction, indifféremment kel Antessar ou Chérifens.

   Cette bonne pratique politique n’a pas, malheureusement, duré ; en effet, lors d’une « rotation », le kel Antessar qui avait le Tobol refusa de le remettre à l’assemblée des délégués ou chefs des fractions dans laquelle les Chérifens majoritaires ont toujours compté plus d’Amanokal que les kel Antessar minoritaires; le velléitaire kel Antessar plus guerrier que maraboutique « s’adjugea » ainsi la chefferie de la Tribu en gardant, par devers lui, le Tobol.

Depuis lors, les fractions Chérifens de la Confédération kel Antessar-Chérifens passèrent du statut d’égales (voire supérieures) – un « chérifien-Qôreyche » (descendant direct du Prophète Mohammad, PSL) est « supérieur » à un kel Antessar selon les Hadiths – à celui de « tributaires » des kel Antessar, les « compagnons » du Prophète Mohammad, PSL.

Le Tobol, instrument du pouvoir politique chez les touaregs nomades, qui sera détenu depuis lors par les kel Antessar – normalement plus maraboutiques que guerriers, selon le Serment  de Samba, leur ancêtre médinois qui a fait le serment à ses descendants de ne jamais combattre qu’en autodéfense – suivant le régime de succession du père au fils, passa au régime dit « dual » : deux Amanokal kel Antessar seront désignés en même temps par l’Assemblée de la Tribu, l’un jouant le rôle de Cadi pour gérer les questions internes et religieuses, poste revenant à l’entité « groupes et clans de l’Ouest-Goundam » et l’autre au poste de chef de guerre issu des « groupes et clans de l’Est » (Bourem-Rharous et Tombouctou); ce bicéphalisme de la chefferie tribale kel Antessar que certains historiens appellent « Iguelad » plutôt que « Tademakkat », sera perpétué jusqu’à l’arrivée des colons français qui éclatèrent la Grande Tribu kel Antessar en deux Tribus : la Tribu kel Antessar de l’Est qui avait son territoire d’attache sur la rive gauche du fleuve Niger (épicentre Ber) et celle de l’Ouest qui évoluait dans les pourtours du système Faguibine et lacs connexes (épicentre Farach).

La distribution clanique et spatiale des Tribus nomades touarègues d’avant le Mali.

Tout au long de la période coloniale et peu avant l’indépendance du Mali, les Tribus nomades touarègues se distribuent, claniquement et spatialement, comme il suit, du Nord-Est (Kidal, Gao et Ménaka) à l’Ouest (Tombouctou) ; la liste des fractions qui composent la tribu n’est qu’indicative.

  1. Ifoghas de l’Adagh (Kidal)
  2. fractions Ifoghas
  3. fractions Imghad
  4. fractions Idnan 
  5. Iwellemeden de l’Ezawagh (Ménaka)
  6. fractions Iwellemeden 
  7. fractions Imghad
  8. autres fractions akelouten-iderfan-izembelouten (des kel-Tamacheq noirs qu’on appelle « Eklan » ou « Bellas »
  9. Daouçahak de de l’Ezawagh (Ménaka)
  10. fractions Daouçahak
  11. autres fractions akelouten-iderfan-izembelouten (des kel-Tamacheq noirs qu’on appelle « Eklan » ou « Bellas »
  12. Chamanamas du Tilemsi (Gao)
  13. fractions Chamanamas ;
  14. autres fractions Ineslemen (les touaregs musulmans d’origine arabo-berbère par opposition aux Imouchagh qui, eux, d’origine berbère, sont peu islamisés 
  15. kel-Essouk de la vallée du fleuve Niger (Bourem-Gao)
  16. fractions kel-Essouk 
  17. autres fractions
  18. Imghad de de la vallée du fleuve Niger (Bourem-Gao)
  19. fractions Imghad
  20. Autres fractions Ineslemen
  21. Imouchagh-Iguiwadarane du Haoussa et de Gourma-Rharous
  22. fractions Iguiwadarane
  23. Autres fractions ineslemen- akelouten-tarbanassa-foulan 
  24. Imghad  du Haoussa et du Gourma (Rharous-Tombouctou)
  25. Fractions Imghad
  26. Fractions Imadadaghen
  27. fractions Ikounedhene
  28. Imouchagh-Tingueréguef de la Boucle du Niger (Tombouctou-Goundam)
  29. Fractions Tingueréguef
  30. fractions Kel Haoussa
  31. fractions Kel Tintébéremt
  • Kel Antessar du Haoussa-Boucle du Niger (Bourem-Rharous-Tombouctou-Goundam)
  • fractions Kel Antessar
  • fractions chérifènes.

La représentativité politique chez les touaregs nomades du Mali.

 La suppression des chefferies (tribus et cantons) en 1963, dans tout le Mali, est le fait du régime socialo-communiste de Modibo KEITA qui « collectivisera » et « étatisera » aussi les terres agricole et pastorales en mettant en place une réforme agraire qui « punit » les touaregs de la boucle du Niger jugés « seigneurs féodaux ».

Si la suppression des chefferies demeura irréversible sur toute l’étendue de la république, le régime politique libéral de Moussa TRAORE remettra, en bon endroit, la tenure foncière individuelle (les champs de culture et les bourgoutières, cas de la boucle du Niger et de la vallée du fleuve)  et collective (les pâturages exondés et inondés, cas du Macina-lac Débo).

Depuis l’avènement de la déconcentration administrative durant les années 1980 et la décentralisation  depuis les années 1990, la fraction nomade (minimum de 200 personnes) a le même statut administratif qu’un village sédentaire (de plus 1000 habitants), statut reconnu par un arrêté du gouverneur de la région qui érige, suivant leurs demandes, les groupes et clans nomades en fractions nomades et les hameaux de cultures en villages, nouvelles entités reconnues par l’administration et les organisations politiques.

La représentativité élective pour conduire les affaires de la fraction nomade donne un comité de fraction élu en assemblé générale de la fraction qui est représenté au niveau communal ; la commune est constituée de l’ensemble des fractions nomades et des villages sédentaires. Cette parité dans la représentativité élective fait plus de places politiques aux nomades qu’aux sédentaires là où le nombre de fractions nomades dépasse celui des villages sédentaires, c’est le cas dans tout le septentrion malien.

De ce qui précède, on peut légitimement se poser la question de savoir de quoi les touaregs nomades se plaignent  de leur « mise à côté » dans la gestion politique des affaires  locales là où il y a trois communautés ethniques juxtaposées : sonraïe, arabe et touarègue ? La situation dans le cercle de  Goundam est le cas le plus avéré.

Dans les faits, durant trente ans – la première république de 1960 à 1968 (Modibo KEITA) et la deuxième république de 1968 à 1991 (Moussa TRAORE) –, de mon point de vue, les nomades furent bien représentés, claniquement parlant, aux instances politiques de niveaux local (Conseils de cercles et Communes rurales), régional (Assemblée régionale) et national (Assemblée Nationale) par leurs notabilités coutumières, c’est-à-dire des hommes cooptés par l’appareil du Parti Unique (et inique !) dans la hiérarchie tribale suivant des scrutins électoraux « orientés » ; ainsi, ce furent essentiellement des chefs de tribus/cantons/fractions qui occupèrent les postes électifs en milieu nomade, tant chez les arabes que chez les touaregs jusqu’à l’avènement de l’ouverture démocratique en 1992.

Si pendant le régime du Parti Unique US-RDA socialo-communiste de Modibo KEITA, le « cooptage » des notables nomades (des chefs de tribus/cantons/fractions) pouvait coincider avec les vœux des populations locales hyper conservatrices, il n’en fut pas de même du temps du Parti Unique UDPM libéral de Moussa TRAORE qui « cooptait » des apparatchiks (hommes d’affaires, marabouts) autoproclamés notables nomades.

Depuis l’ouverture démocratique en 1992, la participation à la vie politique des touaregs nomades a eu des fortunes diverses. Si à la première législature d’Alpha Oumar KONARE (1992-1997), les partis politiques qui ont concouru au suffrage universel avaient présenté des candidats nomades non issus de la nomenklatura tribale – vouée aux hégémonies par les politiciens maliens depuis l’indépendance du Mali – qui, cependant ,« plaisaient » dans leurs discours politiques, par leur charisme et leur désintérêt affiché pour des prébendes,  aux populations nomades qu’ils représentaient.

Les choses se « gâtèrent » au deuxième mandat d’Alpha Oumar KONARE (1997-2002) ; en effet, parce que le président fut mal réélu, son second mandat a vu arriver des apparatchiks nomades « tout-venant » voués au clan politique majoritaire ADEMA. Ceux-là se faisaient élire, moins pour représenter les populations et défendre leurs intérêts que pour se faire une bonne place dans le microcosme politique qui sentait la magouille politicienne, le népotisme et la corruption prenant la place chez les élus locaux touaregs nomades de la réelle mission de représentativité politique efficace et efficiente.

Durant les deux mandats d’Amadou Toumani TRAORE (2002-2012), la mission de représentativité politique chez les touaregs nomades a pris des allures de sport; le choix des maires, des conseillers régionaux et nationaux chez les nomades étant fait selon l’humeur du Général ATT qui instrumentalisa le choix des élus locaux nomades en méthode de gouvernance du septentrion malien devenu un terrain de jeu où il faille tenir compte des performances et des habiletés de ceux qui seront élus du Nord Mali dans la gestion mafieuse  et clientéliste des prises d’otages européens, le contrôle de la manne narcotrafique et la vigilance face à une « génération spontanée » de rebellions touarègues.

Ce fut assurément une gestion politique calamiteuse sous ATT qui a entrainé qu’au cours de son premier mandat, celui-ci favorisa l’émergence d’élus locaux touaregs nomades (hommes et femmes) qui auraient un semblant de respectabilité clanique et de visibilité politique, des choix orientés pour sauvegarder, dit-on, le nécessaire équilibre politique entre les différentes communautés sonraïe, arabe et touarègue, dans le septentrion malien.

Les « affaires politique » chez les touaregs nomades du septentrion malien ont empiré lors du deuxième mandat d’ATT (2007-2012) puisqu’il fallait au Général démarrer et aussi terminer son dernier mandat en beauté selon sa conception des choses en changeant les élus locaux du septentrion qui ont failli lors du premier mandat.

Lors des élections législatives de 2007 et communales de 2009, les élus touaregs qui n’ont pas pu aider à contenir et à endiguer efficacement les rébellions touarègues sont remplacés par des élus arabes qui sont supposés, eux, pouvoir lutter contre les rebelles touaregs, tout en maintenant les flux financiers de la contrebande saharienne et du trafic de la cocaïne, le principal sport des jeunes arabes sahariens.

Il est avéré que les élections législatives de 2007 et communales de 2009 furent entachées de népotisme de clientélisme et de favoritisme « arabe » – et dans une certaine mesure des clans Imghad et Idnan de Kidal et de Gao – de type « maffia italienne » tel que pour favoriser la substitution des élus arabes et Imghad préjugés plus efficaces aux élus touaregs – notamment kel Antessar et Ifoghas, les deux poids lourds touaregs politiques – jugés défaillants, deux phénomènes inconnus jusqu’alors au Mali sont apparus :

  • des milices arabes ont enlevé des candidats touaregs pour les menacer de mort en vue que les touaregs pris en otage signeraient leur abdication aux élections ;
  • les résultats des bureaux de vote itinérants chez les touaregs nomades de la région de Tombouctou furent invalidés par la Cour Constitutionnelle au motif fallacieux de « bourrage des urnes » ; les résultats des bureaux de vote itinérants chez les arabes et les Imghad/Idnan furent validés alors que ce sont bien ans ceux-ci qu’il y a eu le vrai « bourrage des urnes ».

En conséquence de tous ces trucages électoraux de 2007 et 2009 dans les régions du Nord Mali, les instances politiques locales et régionales dans les zones à majorité touaregs nomades n’ont pas fonctionné depuis lors, ni là où les maires et les conseillers arabes et Imghad/Idnan  furent imposés aux populations majoritairement touarègues kel Antessar-Chérifens (cas du cercle de Goundam) et, pire, là où des conseillers nationaux et des députés touaregs Imghad/Idnan et arabes acquis au clan ATT qui a coopté et imposé des hommes et des femmes touarègues et arabes mal aimés dans le milieu, reconnus porteurs d’habiletés en magouilles politiciennes et autres contrebandes (cas de la région de Kidal et Gao).

Ironie du sort, ce fut dans les rangs des mêmes mal élus Arabes-Imghad-Idnan, affidés d’ATT, que se sont retrouvés, en 2012, des parias et des apatrides qui ont rallié le MNLA, Ansar Eddine, MUJAO et AQMI ; tous traitres à la Nation qui sont couchés, en bonnes places, dans les listes des maliens du septentrion accusés par le GRM et la CPI d’atteinte à la sécurité de l’Etat et de crimes contre l’humanité.

Plaidoyer pour la reconstruction du tissu  social et clanique suffisamment déchiré chez les populations touarègues nomades qui ont perdu tous les bons repères tribaux d’antan.

       Il s’agit, dans ce chapitre, de tenter de proposer des orientations pour :

1) reconstruire le tissu   social et clanique suffisamment déchiré chez les populations touarègues nomades qui ont perdu tous les bons repère tribaux d’antan ;

2) changer le mode de désignation des représentants politiques des populations touarègues nomades du Mali en capitalisant le vécu passé et anticiper le futur proche ;

Cela, en tenant compte de l’urgence qu’il faille préparer les populations touarègues nomades à affronter les deux défis majeurs, à savoir :

  1. participer efficacement aux négociations et à la réconciliation intra et infra communautaires, un processus participatif et citoyen couché en bonne place dans la feuille de route de la transition ;
  2. participer aux prochaines élections locales, régionales et nationales issues de la quatrième république qui sera mise en place en Juillet 2013, un processus citoyen participatif qui sera mis en place après la résolution de l’actuelle crise qui a vu les régions du Nord Mali séparées du reste du pays par le phénomène que j’appelle la « col-islamisation ». La « col-islamisation » est la conjonction de la « colonisation » des trois régions du Nord Mali par les rebelles touaregs séparatistes et indépendantistes du MNLA et de la «réislamisation» par des jihadistes chariaristes, des terroristes narcotrafiquants d’Ansar Eddine, du MUJAO et d’AQMI.

Pour la réhabilitation des valeurs sociétales claniques et tribales traditionnelles chez les touaregs nomades.

Grâce au recul que mon âge et mon intérêt pour  ma « temoust n u Tamacheq » (mon identité spécifique targuie) me permettent, je ne pense que pas c’est parce que le pouvoir politique au Mali a supprimé les tribus, cantons et chefferies dans toutes les communautés maliennes – cela depuis l’indépendance – qu’il a eu la perte des valeurs sociétales claniques et tribales traditionnelles chez les touaregs nomades ; de mon point de vue, c’est plutôt la dégradation des mœurs, des us et des usages de la de la culture, voire de la « civilisation » des kel-Tamacheq qui est la raison principale de cette érosion des valeurs sociétales touarègues.

 Les parents ont démissionné et les fils qui ont eu « les yeux ouverts » ont pris des libertés pour imiter la « civilisation » des « autres » (voir à ce sujet mon essai « temoust en danger de mort chez les touaregs de la ville », 2009) en abandonnant la leur jugée contraignante, voire coercitive en ce que les règles de la société traditionnelle targuie imposent l’observation de normes de conduite morale et sociale individuelle et collective qui jugent et culpabilisent globalement tous les membres de la communauté targuie.

Cette situation d’absence de contrôle civique et citoyen dans la société kel-Tamacheq date seulement des années 1970 ; avec les sécheresses récurrentes, la société touarègue traditionnelle s’est délitée et disloquée tel que les recours au communautarisme clanique traditionnel d’entraide sociale nomade n’a plus lieu, « chacun pour soi, Allah pourvoit pour tous »; alors, adieu le clan, le groupe, la fraction et la tribu, même pour les besoins de survie, à plus forte raison pour la pratique d’une gestion politique concertée, participative et partagée des affaires tribales entre tous les démembrements de la tribu qui reste, quand même, une référence vivace.

La société targuie nomade d’après les sécheresses s’est « fabriqué » de nouvelles habitudes et attitudes en politique générale de gestion – je dirais plutôt de non gestion – des affaires des groupes communautaires tel que c’est l’individualisme outrancier qui prévaut maintenant ; il n’y a plus de vie en gros campements nomades ; même des nomades qui vivent dans le même terroir d’attache (autour d’un puits pastoral) ne se concertent plus, la communication nomade s’arrêtant à demander à ceux que vous rencontrez aux puits, aux pâturages, aux marchés forains hebdomadaires : « ma-idiane » (quoi de neuf), relativement aux évènements du moment (des attaques de rebelles touaregs, des ripostes de l’armée malienne). On ne demande plus comme à l’ancienne des nouvelles instructions du Chef de fraction, canton et tribu selon la communication suivante : «qu’est-ce que les voyageurs revenus de Ras el-Mâ, de Gargondo et de Goundam vous disent de nous transmettre de la part de notre Amanokal ? Doit-on voter pour tel ou tel candidat ? Quand est-ce que la mission des vétérinaires arrivera à notre puits ? ».

De mon point vue,  il faut réhabiliter – faire renaitre de ses cendres – la bonne et efficace tradition ancestrale d’écoute, de communication et de concertation en milieu touareg nomade ; cela permettra, à coup sûr, de reconstruire le tissu social et clanique suffisamment déchiré chez les populations touarègues nomades qui ont perdu tous les bons repères tribaux d’antan. 

J’enlève toute équivoque en ce qui concerne ma proposition de réhabilitation des systèmes anciens ; je ne plaide pas ici pour remettre les vieillottes chefferies en place ; il s’agit pour moi de proposer à ce qu’on revienne aux normes de gestion du politique chez les touaregs nomades pour les faire coincider avec la fameuse « temoust  n u Tamacheq » ; le citoyen lambda targui se reconnait d’abord d’appartenance à son clan (tribu) plus qu’à sa filiation parentale ; quand vous demandez à un targui de se présenter, il ne déclinera que le nom de sa communauté (clan, groupe, fraction et tribu), difficilement, il dira le nom de son père et ancêtres.

Changer et/ou améliorer le mode de désignation des représentants politiques des populations touarègues nomades du Mali en capitalisant le vécu passé et anticiper le futur proche. 

Comme on dit que ce sont les ruisseaux qui forment les rivières, celles-ci forment les fleuves, ces derniers forment les océans, je préfigure, ici, que les groupes et clans touaregs nomades sont comme des « ruisseaux et rivières », les fractions « les fleuves » et la tribu correspondrait à l’océan.

Je propose, ici et maintenant, que le concept de « tribu » chez les touaregs nomades soit revitalisé et opérationnalisé, sur la base du volontariat, par les jeunes cadres intellectuels touaregs qui pourraient bénéficier de l’appui méthodologique des vieux cadres intellectuels touaregs – comme moi – qui ont vécu l’effectivité « tribale » targuie.

Il est indéniable que sur la bonne dizaine de tribus de touaregs nomades encore « végétantes », seulement deux (la kel Antessar de Goundam et l’Ifoghas de Kidal) sont passablement – mais non irrémédiablement – disloquées, leurs chefs de tribus vivants assez vieux, cependant « bon pied-bon œil »n’étant plus écoutés par leurs « sujets », ceux de la lignée directe déçus de leur inaction et surtout de ceux « tributaires » émancipés ayant coupé le cordon ombilical avec des « féodaux ethno-racistes » dédaigneux.

Si la représentativité politique des touaregs nomades par des élus locaux dans le comité de fraction et dans le comité communal (la plus basse entité décentralisée) est jugée suffisante, il n’en est pas de même au niveau du cercle pour l’élection des députés et au niveau régional et pour l’élection des conseillers régionaux (Assemblée régionale).

J’estime qu’aux deux niveaux de collectivités territoriales (cercle et région) devrait intervenir une « instance politique faitière » de type « tribu » pour modérer le choix des députés et des conseillers nationaux.

Même si ce « passage obligé » – un passe-droit, une faveur accordée à une minorité ethnique spécifique, les touaregs nomades pas encore assez « citoyennisés politiquement » – doit rester non institutionnel, il  aurait fallu au moins qu’il soit « toléré » par les pouvoirs publics et politiques.

La tribu « politique » pourrait être un point focal ou une instance non formelle au niveau des cercles (Goundam, Tombouctou, Rharous, Gao, Ménaka) et de niveau régional pour Kidal ; voir le tableau « la distribution clanique et spatiale des Tribus nomades touarègues d’avant le Mali », au premier chapitre.

Sur convocation du « chef de tribu » – plus de la moitié des chefs de tribus sont encore vivants – ou de son délégué, les chefs de fractions (ou leurs délégués) se réunissent au chef-lieu de la tribu (ou en tout autre endroit) pour débattre des sujets « élections municipales, régionales et générales ». Les résolutions issues de ces « congrès/palabres » tribaux sont exécutoires par tous les membres de la tribu. Ce serait comme les directives de vote issues du Congrès Mondial Juif qui en impose aux Partis américains.

J’avoue que les méthodes de lobbying et de plaidoyer s’imposent ici pour faire prendre en charge la « question touarègue nomade » par les partis politiques maliens qui demandent des suffrages électoraux des gens de la base touarègue, moins pour les faire valoir en haut lieu que de pouvoir faire la promotion sociale des élus, pour eux-mêmes.  D’où le bon choix des candidats aux élections.

Il faut rompre désormais avec le bon (mauvais, selon !) vieux temps des partis politiques uniques (US-RDA, UDPM, ADEMA, Mouvement Citoyen) où les touaregs politiques s’allient, automatiquement, sur la personne ou l’équipe politique supposée la plus forte au sortir des élections, ce qui est une sorte de refuge et de sécurité pour la minorité touarègue dont les leaders s’alignent, automatiquement, derrière le plus fort pour s’assurer une protection.

Changer impérativement les modes de vote en milieu nomade. 

L’homo nomadicus étant par définition volatile, il est extrêmement difficile d’identifier un nomade électeur par la biométrie puisque le minimum d’identification de la personne manque, à savoir la possession d’une carte d’identité nationale.

            Il est admis que le nomade qui consacre tout sa vie à la poursuite de son bétail n’a pas le temps et les soucis de se prêter à la chose publique civique et citoyenne, toutes préoccupations qu’il juge futiles et une perte de temps.

            Aussi, est-il nécessaire, pour faire jouer au nomade le rôle d’un citoyen qui remplit ses obligations civiques, que l’administration se rapproche du nomade respectueux de l’ordre qui se dit prêt à faire tout ce que lui demandent les autorités pourvu que cela ne dérange pas son programme et ne lui entraine pas un voyage qui l’éloignerait de ses bêtes.

             Concernant le recensement à but électoral sur la base de la biométrie, il faut voir cela à long terme chez les nomades ; le document du RAVEC de 2010 suffirait pour faire voter le nomade ; le carnet de famille à but des impositions des impôts et  des taxes ou la simple carte d’identité pourraient suffire aussi à faire voter les nomades.

            S’agissant des bureaux de vote itinérants pré listés chez les nomades, ceux-ci ont montré leur limite, dans la mesure où les nomades sont difficilement mobilisables en un lieu précis et en un temps limité à cause de la transhumance qui les éloignent de ces lieux, les passages de la mission de vote n’étant pas communiqués à temps, et surtout, les fraudes (bourrages des urnes) sont rendues possibles ‘et faciles) par l’absence d’électeurs et de tous les représentants des partis politiques en lice.

            Tenant compte de tout ce qui précède, je propose que le vote chez les nomades soit effectivement mobile, itinérant et de temps illimité. Les équipes de vote chez les nomades devront parcourir toutes les contrées, passer de campement et campement. Pour cela, il aurait fallu que le vote commence un mois d’avance chez les nomades et que les équipes de vote comptent parmi elles, au moins pour moitié, des autochtones qui connaissent le terrain et parlent la langue des votants.

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